Achlys — Le Lys Blanc

L’enfant attendu. La fille prodige. La femme prodigue. C’est tout l’indécence de sa position qui se matérialise, comme la manifestation désincarnée des attentes naturelles aux grands de ce monde. Elle est la dernière arrivée, Achlys, d’une de ces familles opulentes qui fréquentent l’air iodé de Marenostre. Avec tout l’hédonisme qui vient en accumulant l’argent et le pouvoir et la froideur, aussi, l’indifférence glaciale inculqué à la progéniture. Il n’y a de chaleur, dans la vie de la fleur, que celle procurée par les étreintes maternelles de la nourrice. Le souvenir est si vif, si franc, qu’il en brûle presque sa peau. A l’image du soleil, haut dans le ciel, qui protège sa candeur des desseins ambitieux de l’organisation. L’elfe est la première d’une lignée matriarcale, enchainement de femmes toutes plus puissantes les unes que les autres qui ne laissent personne marcher sur leurs pieds — Rien ne change vraiment à Aeriscordo, perchée en haut de sa tour d’ivoire, mécène d’excellence à la recherche des pièces pour compléter sa collection. Pour étayer son carnet d’adresse à grand coup d’impulsions, compulsions maladives pour s’entourer. Elle craint la solitude. Elle en a presque de l’urticaire. Elle a peur du silence dans ses appartements. Du bruit de ses talons qui résonnent contre le marbre. Elle a peur de se mettre à douter, de penser sa place autrement qu’évidente et méritée. Consommation, consumation, le rôle commence à lui coller à la peau pour ne plus jamais réussir à en enlever le costume, la peau manquerait presque de partir avec — Achlys, ainée d’une famille de quatre enfants, quatre filles, qui entretiennent le mysticisme de leurs rangs. Chacun à sa 0position à occuper, du développement technologique à l’entretien d’artistes en devenir. L’elfe préfère la rencontre avec les autres et propose aux plus motivés quelques pièces pour financer ces projets qui lui font de l’œil. Comme elle vomit les prétendants qui se pressent à ses pieds, pour les baisers, simplement motivés par l’appât du gain. Ils ne tiennent jamais longtemps la route, femme de caractère à la silhouette élancée. Ils n’arrivent pas à la suivre, les pauvres bougres. Ça ne semble pas les décourager pour autant, idiotie perpétuelle de ces hommes qui se pensent plus importants qu’ils ne le sont — Ne se sont-il pas enfuis en se retrouvant confronter à la force de la nature qui se dressait devant eux? Ou a l’évocation de ces descendants qu’elle ne pourrait jamais leur donner? Peut-être encore refroidis par l’insensibilité de ses écoutes, à l’absence flagrante de chaleur au fond du lit (presque) conjugal ? A moins que les rumeurs, toutes plus folles les unes que les autres, ne se révèlent véridiques et que leurs têtes trônent sur le luxueux bois de son bureau? — Des soirées mondaines aux messes basses, la silhouette ineffable émeut par son inaccessibilité péremptoire. N’est-il pas plus réconfortant d’en supposer la fatalité, plus romanesque d’en soupçonner les travers au profit des vérités bien gardées.